[Notes de lecture] Sécu, syndicalisme, histoire, romans : 8 livres sociaux pour Noël
Nous les avons tous lus, oui tous. De la première à la dernière page. Les coins cornés et autres annotations en attestent. Pour vous en faire profiter, voici huit notes de lecture autour du syndicalisme, de l'histoire, ou encore de la Sécurité sociale, et un roman pour agrémenter les vacances.
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Sécurité sociale
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La Sécu, 80 ans et toutes ses dents Cet opuscule de 164 pages aux couleurs de la carte Vitale rend hommage à notre système de santé octogénaire : la Sécurité sociale. Julien Damon, professeur à SciencesPo et conseiller scientifique de l'Ecole nationale de la Sécurité sociale livre un sérieux tour d'horizon des échecs et réussites de la Sécu. De la pauvreté aux soins pour chacun "selon ses besoins", du solidarisme aux origines allemande (on apprend que Bismarck n'a pas seulement fait la guerre à Napoléon III), dans ces pages parfois techniques mais toujours pédagogiques, l'auteur retrace les contours historiques, philosophiques et scientifiques de la vielle dame. A noter en fin d'ouvrages des pages passionnantes de comparaison avec le système américain de protection sociale qui a fêté en 2025 ses 90 printemps. Petit éloge de la Sécu, Julien Damon, Presses de SciencesPo, 8 €
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Syndicalisme
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Marylise Léon, une voix syndicale Si vous n'avez jamais rencontré Marylise Léon et que vous souhaitez découvrir la secrétaire générale de la CFDT, ce livre est pour vous. Dans "S'engager", elle présente son parcours du poste de responsable sécurité environnement à sa rencontre avec les élus du personnel qui l'ont conduite sur la voie du syndicalisme, de son mandat fédéral à celui de la direction de la CFDT et de tout ce qui s'ensuit : rendez-vous avec les ministres, mobilisation contre la réforme des retraites, rencontres multiples avec ses militants et coordination avec ses homologues de l'intersyndicale. Mention particulière pour les pages où elle raconte ses premiers pas face aux médias, le jour de son élection : "Et puis je suis sortie pour rejoindre la grande salle et… ce fut le mur de la presse ! C'est ça qui m'a marquée. Je ne sais pas combien de journalistes il y avait, mais c'était impressionnant. J'ai sorti mon téléphone et j'ai immortalisé ce moment. Ça y était. Je m'y collais". S'engager, Marylise Léon, Flammarion, 20 € |
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Dernier combat d'une militante Force Ouvrière Elle aura défendu tout le monde, sauf elle-même. "Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans" raconte la triste fin de Letizia Storti, militante FO et ouvrière dans une usine de médicaments Upsa, près d'Agen. Les hasards de la vie lui permettent de participer comme figurante à un film de Stéphane Brizé, réalisateur de longs métrages, souvent autour des thèmes du travail et des plans sociaux. Enthousiaste, elle impressionne l'équipe de tournage par son jeu sincère de défense des salariés. Un rôle qu'elle maîtrise parfaitement puisqu'elle est élue FO au CSE de l'usine où elle travaille depuis 36 ans. Mais son retour au travail se passe mal. Certains ont mal vécu qu'elle prenne la lumière. On la raye des listes. Sa hiérarchie l'affecte à des postes inadaptés. Après une chute, elle tente de se suicider sur son lieu de travail, jusqu'à ce qu'on la retrouve inanimée sur un parking. Laetizia Storti, ou le parcours d'une écorchée vive magnifiquement racontée par l'auteure Anne Plantagenet. Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans, Anne Plantagenet, Points poche, 6.95 € |
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Inégalités
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Paris – Province : l’autre fracture française En juillet 2025, une étude de l’Insee révèle que les inégalités économiques sont au plus haut depuis trente ans. Un autre constat écrasant parcourt le livre du journaliste Francis Brochet : “Le parisianisme écrase la France”. Appuyé sur de solides études et chiffres officiels, l’auteur, correspondant du groupe de Presse Ebra pour des quotidiens régionaux, lance un cri d’alarme : “La fracture est sous nos yeux, nous refusons de la voir”. Son sujet : mettant en danger la cohésion républicaine du pays, les politiques économiques, en particulier culturelles contribuent à l’abandon des campagnes. Lignes de transports, hôpitaux, commerces y sont moins nombreux. La densité d’offre culturelle y est aussi plus faible. Un seul chiffre : le budget du ministère de la Culture arrose les Parisiens de 800 euros par habitant, et les provinciaux de 27 euros seulement. Un ouvrage dense et éclairant, un chant du cœur pour les campagnes. Quand le parisianisme écrase la France, Francis Brochet, Editions de l’Aube, 17.90 € |
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Démolition des poncifs sur le travail et la pauvreté “On gagne plus avec le RSA qu’avec le Smic”. “Les pauvres sont responsables de leur pauvreté”. “Il faut réduire les allocations chômage pour encourager le travail”. Qu’elles sont nombreuses, répandues et ancrées, les idées reçues sur la pauvreté ! Elles viennent d’ailleurs régulièrement rythmer les débats publics sur l’actualité sociale. A commencer par le lieu commun selon lequel il faudrait réduire le code du travail pour favoriser l’emploi. Ce court opuscule rédigé par les équipes d’ATD Quart Monde démolit ces poncifs avec une efficacité redoutable : “Aucune étude n’a jamais démontrer le lien entre la protection sociale du travail et le taux d’embauche”. Voilà un ouvrage qui vous donnera des contre-arguments pendant les fêtes de famille. En finir avec les idées fausses sur la pauvreté, ATD Quart Monde, Editions de l’Atelier, 5 € |
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Histoire
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Quand les Ducs de Bourgogne défiaient la France En l’an 500, le royaume Burgonde s’étend du nord de Marseille au Sud de Reims, comprenant les villes de Genève et Lausanne. Aux XIVe et XVe siècles, les principautés acquises par la maison de Bourgogne incluent les villes de Verdun, Metz, Luxembourg et jusqu’au nord de la Hollande. La plupart d’entre nous ignorent la puissance déployée par la lignée des Ducs de Bourgogne pendant tout le Moyen-Age, de Philippe Le Hardi à Charles Quint. Pour une raison simple : l’histoire de notre pays nous est enseignée sous l’angle des Rois de France. Pourtant, la Bourgogne les a bien mis au pas et a conquis par le biais de batailles, de mariages et d’alliances, une partie de l’actuelle Europe occidentale. Cette histoire qui lève le voile sur notre ignorance est racontée avec un brio chevaleresque par Bart Van Loo en une sorte de “Game of Thrones” à mi-chemin entre une série télé et les Rois Maudits. Même ceux qui détestent l’histoire y trouveront leur compte. Les Téméraires, Bart Van Loo, Editions Champs, 15 € |
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La Belle époque du progrès et de la misère La Belle époque porte-t-elle bien son nom ? Pas sûr. Si la période de 1900 à 1914 a connu d’indéniables progrès techniques avec l’invention de l’automobile et de l’aviation, elle reste une période de misère pour bon nombre de Français. L’expression est donc surtout née par nostalgie après le choc de la Première guerre mondiale. Pendant cette décennie, la condition ouvrière s’améliore légèrement, mais au prix de grèves intenses (surtout à partir de 1906) et réprimées dans la douleur. La Sécurité sociale n’est pas encore née et les travailleurs ont en partage la précarité, le chômage et de multiples maladies non prises en charge. Contrairement à une idée répandue, la moitié des ouvriers sont embauchés dans des entreprises de moins de 5 personnes. Seuls 10 % d’entre eux travaillent dans des usines comptant plus de 500 ouvriers. Avec sa précision redoutable, l’historien Michel Winock dresse le portrait d’une époque pas belle pour tout le monde. La Belle époque, Michel Winock, Editions Tempus, 11 € |
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Romans
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Solidarité par temps de totalitarisme Aux alentours de 1933, sept prisonniers politiques s’échappent de l'un des premiers camps de concentration allemands, probablement celui de Dachau. Le commandant du camp, obsédé par cette évasion, lance ses unités à leurs trousses et décidé d’ériger sept croix pour torturer ceux qui seront repris. Dans une folle cavale peuplée de traîtres et de dangers, un seul fuyard échappe à ses poursuivants. Aidé par d’anciennes solidarités ouvrières, il se réfugie chez ses compagnons de travail, à bout de forces, au bord de l’épuisement. La septième croix restera vide. Anna Seghers, elle-même réfugiée politique en France lors de la prise de pouvoir d’Hitler adopte une écriture cinématographique toute en plans-séquence pour faire vivre au lecteur la terreur des débuts du nazisme. A ne pas lire pour s’endormir. La septième croix, Anna Seghers, Editions Points, 9.30 € |







