Quand l'utilisation du robot Watson n'a pas d'effet sur les conditions de travail des salariés pour la justice
Par un arrêt du 12 avril 2018, la Cour de cassation confirme la décision du TGI de Lyon ayant annulé la désignation d’un expert par le CHSCT du Crédit Mutuel visant à examiner les modifications des conditions de travail liées à l'introduction d’un programme informatique d'intelligence artificielle auprès des chargés de clientèle et des chargés d'affaires.
Rappel des faits. En 2016, la banque déploie de façon progressive Watson, un logiciel d’IA créé par IBM, dans tous les points de vente des fédérations de Crédit Mutuel et des banques CIC. Au total, « environ 20 000 conseillers » sont concernés. Sur son site internet, le Crédit Mutuel indique que l’outil « assiste les conseillers dans le traitement des emails clients en identifiant automatiquement les demandes les plus fréquentes, en détectant l’urgence de la demande et en outillant l’exécution ou la délégation des tâches associées ». Quant aux chargés de clientèle, ils sont « aidés dans la recherche d’informations via un dialogue en langage naturel, respectivement dans le domaine de l’assurance de biens et dans le domaine de l’épargne aux particuliers ».
Le CHSCT décide de désigner un expert pour examiner les conséquences engendrées par l'outil sur les conditions de travail des salariés. Le code du travail offre en effet cette faculté, « en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ». Le Crédit Mutuel décide de saisir en référé le président du TGI de Lyon pour requérir l'annulation de la délibération ayant désigné l'expert. Le TGI fait droit à la demande de la banque. Le CHSCT se pourvoit en cassation.
A l’appui de son pourvoi, le CHSCT faisait valoir que le logiciel « portait en lui-même la potentialité d'un redécoupage des missions des salariés et donc une modification notable des conditions de travail ».
Un argument écarté par la Cour de cassation. Se fondant sur l’utilité pratique de l’outil, qui permet aux salariés de « traiter les abondants courriels qu'ils reçoivent », la Cour considère que l’application du logiciel « se traduit directement en termes de conséquences mineures dans les conditions de travail directes des salariés dont les tâches vont se trouver facilitées ». L'existence d'un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés n'ayant pas été démontrée, la Cour confirme l’annulation de la délibération du CHSCT désignant un expert.
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Le nouveau comité social et économique (CSE) aura également le droit de se faire assister par un expert habilité en cas de projet d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés. |
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