«Les besoins de recrutement en juridique se généralisent, dans tous les secteurs», selon P. de Vienne
Au premier trimestre 2018, la croissance en volume d’offres d’emploi concernant les juristes d’entreprise a atteint les 8 % (par rapport au premier trimestre 2017), selon le dernier baromètre européen de l'emploi du cabinet spécialisé dans le recrutement de candidats expérimentés au sein de tous les types d’entreprises.
Que peut-on dire de cette augmentation constatée en ce début d’année 2018 ?
Le chiffre est conséquent. Nous observons une croissance pour les métiers du juridique depuis le 2e trimestre 2016 qui s’est poursuivie en 2017. Elle se confirme sur 2018 et devrait se maintenir jusqu’à la fin de l’année au moins. Nous sommes à flux tendus sur le recrutement du secteur et des métiers qui gravitent autour. Notre niveau d’activité ne baisse pas, bien au contraire. C’est très encourageant. Le besoin en profils seniors, rapidement opérationnels et capables de manager, est plus important qu’auparavant. Ce qui marque aussi la reprise perenne de l’activité de recrutement des juristes.
Quels profils sont les plus recherchés ?
L’année dernière, les demandes les plus importantes concernaient des profils d’experts : juriste IT, immobilier, M&A, concurrence, etc. Cela démontrait une reprise de l’activité, mais encore ciblée, pour les métiers du juridique. Pendant plusieurs années, les recrutements au sein des entreprises étaient faibles et rarement tournés vers les fonctions supports de l’entreprise.
Cette année, la donnée nouvelle est le taux de recrutement de juristes en droit des affaires qui a augmenté de 11 % par rapport au premier trimestre 2017. Ces postes visent les juristes généralistes capables d’intervenir sur des contrats - parfois internationaux - en droit économique et commercial - en général -, en droit de la distribution, propriété intellectuelle, droit des sociétés - dont le soutien aux opérations M&A -, droit des assurances, en financement et suivi des contentieux, etc. Parfois, le candidat a seulement quelques-unes de ces casquettes. Ce nouveau chiffre est très encourageant car il illustre une reprise globale du recrutement des métiers de juriste d’entreprise. Après avoir été marqués par les spécialités, les besoins de recrutement en juridique de nos clients se généralisent, et ce dans tous les secteurs.
Les juristes spécialisés ne sont toutefois pas en reste. La tendance à recruter des juristes IT et en droit immobilier continue. La digitalisation des entreprises touche tous les secteurs avec ses problématiques légales d’applications mobiles, de sites internet, et de contrats informatiques qui sont de plus en plus complexes (contrats de maintenance, d’hébergement, de software, de sécurisation des data, etc.). Parfois, le juriste IT doit aussi s’occuper de la gestion de la data, sujet particulièrement d’actualité avec l’entrée en application du RGPD. Le marché du recrutement est tendu pour cette spécialisation. La demande est plus forte que l’offre (+ 10 % constaté au 1er trimestre 2018).
Les juristes en droit immobilier sont toujours fortement recherchés (+ 8 %). Nous avons recruté différents profils : des juristes en baux commerciaux, en promotion immobilière, capable de gérer des transactions, de l'aménagement ou de la construction, etc. Toutes les spécialisations du droit immobilier sont recrutées.
Il y a-t-il des profils moins recherchés que d’autres cette année ?
Pas vraiment. Nous avons participé au recrutement de juristes en concurrence, en M&A, ou spécialisés en bancaire, en financement de projet mais aussi en droit public. Il n’y a pas de spécialité qui manque à l’appel. Nous avons eu moins de demandes sur la propriété intellectuelle ou de spécialistes contentieux, mais cela s’explique car ces marchés sont plus petits et moins internalisés.
Avez-vous beaucoup de demandes de recrutements touchant à la compliance ?
La compliance est un sujet pour tous nos clients. Les enjeux sont nouveaux. Nous recrutons beaucoup en la matière et avons un rôle de consulting sur des structurations de postes. Comment structurer les équipes ? Quel profil recruter et de quelle manière ? Faut-il se tourner vers quelqu’un en interne ? Quel doit être son rattachement hiérarchique ? C’est aussi un marché tendu où les candidats sont très sollicités. Un recrutement externe d’un candidat ayant déjà les compétences peut être intéressant, notamment au sein d’une entreprise devant mettre en place le chantier de la loi Sapin II de A à Z.
La direction juridique a pris du poids avec la complexification des normes. Les entreprises ne peuvent plus se passer du droit et les directeurs juridiques ont un positionnement stratégique de plus en plus important : ils sont maintenant presque toujours rattachés au comité exécutif ou au comité de direction, ce qui n’était pas forcément le cas il y a 10 ans. Très fréquemment, la compliance est implantée au sein de la direction juridique. Dans certains secteurs spécifiques, comme la banque et la finance, la tendance est à la création d’une direction compliance indépendante.
Que recherchez-vous chez un bon candidat en compliance ?
Un profil intéressant sera celui d’un candidat ayant mis en place tout un programme de conformité (réalisation d’une cartographie des risques, d’audits, et définition ainsi que vérification de process internes) ou l’ayant refondu. Le background demandé dépend ensuite du secteur. Par exemple en bancaire et financier, le compliance officer est souvent un ancien opérationnel, parce que les produits sous-jacents sont très techniques. Plus généralement, nous voyons aussi beaucoup de profils mixtes, associant le juridique. Car ce qui compte c’est une excellente maîtrise du milieu réglementaire et les juristes ont un avantage en la matière. Ils ont une forte expertise et une bonne transférabilité pour se lancer dans la compliance.