Les directions juridiques veulent des juristes et des "business men" !
Au-delà d'un anglais professionnel irréprochable, les directions juridiques ne recherchent plus seulement de bons juristes, elles veulent aussi des « business men » capables de comprendre le fonctionnement et les enjeux commerciaux de l'entreprise. Quelques explications avec trois spécialistes du recrutement.
« 5 ans de droit, un passage en école de commerce et un LLM [Master of Laws], c'est l'autoroute de la réussite pour le candidat », confie Juliette Leblanc, associée de Maj Consulting. Spécialisé dans le recrutement de profils juridiques pour les cabinets d'avocats, les offices notariaux et, plus ponctuellement, pour les entreprises, Maj Consulting n'est pas le seul à dresser ce constat.
Les entreprises ne recherchent plus seulement de bons juristes, elles veulent des candidats capables de manier les chiffres, et ayant des compétences en gestion et en développement commercial. « L'univers du droit manque souvent de pratique, les juristes n'ont pas la vision business, commerciale, comptable et financière de l'entreprise », souligne Juliette Leblanc. « Or, le juriste en entreprise est confronté au quotidien à des problèmes fiscaux et commerciaux », analyse-t-elle.
L'idéal consiste donc à compléter son cursus de droit par un master dans une école de commerce réputée, comme HEC, l’Essec, l’EMLyon, ou l’ESCP. « La culture école est très demandée, peu importe qu'elle intervienne avant ou après le droit », confirme Sophie Hauret, manager au sein de la division juridique du cabinet de recrutement Robert Half. « Le côté pratique de la formation, le nombre fréquent de stages en alternance, l'appartenance à un réseau, sans oublier le fait que les cours y soient dispensés en anglais, sont autant d'atouts appréciés par nos clients », poursuit-elle.
A côté de cette tendance vers la double compétence, certaines directions juridiques continuent toutefois de miser sur des juristes « purs et durs ». En pratique, les candidats qui sortent d'une école de commerce n'auraient, en effet, pas toujours les bases juridiques nécessaires (en droit des contrats notamment). « On préférera toujours le meilleur juriste même s'il n'a pas de diplôme d'HEC », indique Camus Freoa, senior manager au sein des départements tax & legal et private practice chez Robert Walters. « Le candidat doit avoir un vrai bagage juridique », précise-t-il.
Parmi les formations les plus appréciées des directions juridiques, les diplômes de juriste conseil d'entreprise (DJCE), très axés sur la pratique, occupent la première place. « C'est une excellente formation car elle est dispensée par des professionnels du droit. Il y a une approche pragmatique qui donne une approche plus concrète aux étudiants qu'un parcours classique », souligne Camus Freoa. Les Masters 2 de droit classiques et les DJCE les plus réputés se trouvent aux sein des Universités Paris I Panthéon-Sorbonne et Paris II Panthéon-Assas.
Les profils généralistes restent une valeur sûre. Contrairement aux cabinets d'avocats qui recherchent des techniciens pointus, l'hyper spécialisation n'est pas vraiment appréciée des directions juridiques. Ces dernières préfèrent des collaborateurs opérationnels, capables de suivre les dossiers de A à Z. « Le candidat doit savoir rédiger les contrats, repérer les zones de risques ; nous sommes plutôt sur une notion de droit économique », explique Sophie Hauret, très mobilisée pour rechercher des profils spécialisés en droit économique, droit de la concurrence, droit de la distribution, sans oublier le droit fiscal qui a toujours le vent en poupe. D'autres matières comme le droit de la construction, le droit immobilier et le droit des assurances sont également très appréciées.
Les frontières s'atténuent peu à peu entre les directions juridiques, fiscales et sociales, poussant les structures à se reconfigurer. « De nouveaux métiers apparaissent sans qu'il y ait de formations adaptées », explique Camus Freoa. « On recrute de plus en plus de compliance officer, de contract manager, et des profils spécialisés en affaires réglementaires, notamment pour le secteur banque-assurance », indique-t-il.
Les universités commencent à s'y intéresser, notamment la faculté de droit, sciences politiques et gestion de Strasbourg, qui propose désormais un Master 2 Juriste sécurité financière et compliance officer, ou encore Paris II Panthéon-Assas qui dispense un diplôme universitaire de contract management. La demande étant de plus en plus forte, surtout dans le secteur de la banque-assurance, d'autres pourraient franchir le pas.
|
L'atout des LLM |
|---|
|
Très prisé des recruteurs, le Master of Laws (LLM), programme d’études avancées qui dure entre 9 et 12 mois, est accessible aux candidats disposant d’un premier diplôme universitaire en droit. Parmi ses avantages, le LLM est garant d'un anglais excellent (tous les cours sont dispensés en anglais), de se constituer un réseau plus large avec des juristes du monde entier, de spécialisations professionnelles et de connaissances juridiques comparatives. Les principaux domaines de spécialisation sont le droit fiscal, le droit des sociétés, le droit économique international, le droit commercial, le droit international et l’arbitrage. « Souvent, les grands groupes recrutent des juniors directement sur les campus des LLM car les candidats, pris sur dossier, sont forcément de bons éléments », explique Juliette Leblanc de Maj Consulting. « Outre un enseignement perfectionné en droit des affaires international, mon LLM à Manchester m’a permis d’étudier aux côtés d’étudiants de différentes nationalités et de m’ouvrir à d’autres cultures », témoigne Laura Godard, avocat chez Dentons. « C’est une ligne sur un CV de plus en plus incontournable si l’on souhaite exercer dans un cabinet d’avocats d’envergure internationale », ajoute-t-elle. Seul bémol, les LLM ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Il faudra compter 13 800 £ (17 899 €) pour un LLM à King's College au Royaume-Uni, et jusqu'à 57 200 $ (50 582 €) à Harvard aux États-Unis. |