Juristes associatifs : quand l’humain et le droit ne font qu’un (4)
« Il a été très facile de rédiger ma lettre de motivation ». Après 7 années passées dans le notariat, Angélique Billaut a eu envie de se tourner vers l’associatif. « J’avais besoin de donner du sens à ce que je fais. D’arriver à mettre de l’humain dans mon métier juridique ». Un pari réussi pour la trentenaire qui est chargée des legs, des donations et des assurances-vie au profit des Restos du Cœur, depuis plus de 2 ans. Elle exerce différemment sa profession en étant plus proche de ses convictions.
De son ancienne « vie professionnelle », auprès d’un notaire du Val d’Oise, Angélique ne regrette pas grand-chose. « C’était le contact humain qui me plaisait le plus ». Lorsqu’il fallait savoir écouter la famille d’un défunt, au moment de l’organisation d’une succession, et montrer de l’empathie. Mais rapidement la quantité des actes notariés, à taper dans la journée, a pris le pas sur les rendez-vous avec les clients. « Je me suis sentie submergée par l’administratif. C’est une des raisons pour lesquelles je suis partie. Cela ne correspondait plus à ce que je recherchais ». La jeune femme prend alors la décision de changer de milieu. Elle voit passer une annonce des Restos du Cœur dans le Defrénois. Et en 3 mois seulement elle est recrutée pour un poste presque taillé pour elle.
Aujourd’hui Angélique reçoit des coups de fils. Ceux des bienfaiteurs qui souhaitent rédiger un testament, souscrire une assurance-vie ou faire une donation en faveur des Restos. Ils ont parfois besoin de comprendre le fonctionnement de l’association ou d’obtenir des conseils juridiques pour s’assurer que leur testament profitera bien aux Restos. La jeune femme les rassure. « Les gens ont besoin de parler, d’expliquer leur démarche. Certains bienfaiteurs avouent même avoir un temps bénéficié des Restos. Ils veulent alors rendre l’appareille. Ils me racontent parfois leur histoire. C’est dans ces moments-là que je trouve du sens à mon métier », témoigne Angélique.
Son « background » juridique lui est utile au quotidien. Angélique suit les dossiers de successions au profit des Restos : de leur ouverture chez un notaire jusqu’à ce que la somme d’argent soit effectivement versée à l’association. Mais son métier s’est enrichi. Car elle n’avait pas anticipé le pragmatisme de sa mission dans l’associatif. Des maisons sont léguées aux Restos qu’il faut parfois vider pour que la vente puisse avoir lieu. « Débrouillarde », Angélique appelle alors des entreprises de débarras. « Cela m’est arrivé une fois que le gérant d’une entreprise, ayant eu recours aux Restos par le passé, me fasse cadeau du service », se souvient la jeune femme. Elle se tourne aussi vers d’autres associations, comme Emmaüs, souvent mentionnées dans le testament. Du haut de ses un mètre quatre-vingt, elle s’est même retrouvée « dans le métro, avec trois cartons », pour finir de vider un appartement avant qu’un nouveau loyer ne soit à payer. Elle a géré la vente d’une maison troglodyte. Ainsi que celles de nombreuses voitures données aux Restos. Chercher leur cotation à l’Argus ou contacter un commissaire-priseur, cela fait désormais partie de son « job ». « Nous n’hésitons pas à mettre la main à la pâte », résume la seule salariée à s’occuper des legs et donations pour l’association. Elle peut toutefois compter sur l’aide de deux juristes bénévoles : celle d’un notaire honoraire et d’un ancien juge de proximité.
« Les gens sont très généreux. Mais lorsqu’ils veulent nous léguer des biens en indivision, dans des successions compliquées, nous n’avons pas les moyens humains pour gérer ce type de dossiers ». Angélique doit parfois savoir dire « non ». Et c’est la seule chose qu’elle déplore.
► Retrouvez la page des Restos du Coeur sur les legs, les donations et les assurances-vie au profit de l'association.